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De l'Abbaye de Comté du Nord au Camp des bûcherons, de la Lisière à la Tour d'Azora, la Forêt d'Elwynn est propice aux balades et aux rencontres.
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Emaelle
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Message par Emaelle »

Debout derrière son bureau, face à la fenêtre, Lewis de Therreim contemplait le paysage d'un air maussade. Il tenait à la main un verre de vin qu'il ne goûtait pas, incapable d'apprécier à sa juste valeur le grand cru dont il avait ouvert une des dernières bouteilles de sa réserve sur un coup de tête. Agé d'une soixantaine d'année, il avait une chevelure grise encore bien fournie et une bedaine qu'il ne pouvait plus dissimuler derrière un pourpoint bien serré, preuve qu'il était à la fois riche et sédentaire. Il reposa son verre dans un soupir et s'effondra sur son fauteuil. Il aurait bien fait les cent pas mais l'étroitesse de son bureau en permettait à peine 3. Un maigre inconvénient en comparaison de l'avantage sans pareil d'être logé au château, au plus proche du roi Varian. Mais même cette idée ne suffisait pas à le dérider aujourd'hui.

Et la cause de cette mauvaise humeur était un nom, un simple nom. Qu'il avait cru disparu pour de bon 20 ans auparavant, assassiné sur son ordre. Et voilà qu'il resurgissait sous les traits d'une jeune femme - une gamine à l'époque - dont le sort ne l'avait jamais préoccupé. Il y avait peu de risques qu'elle sache quoique ce soit de lui ou du Cercle, c'était déjà surprenant qu'elle connaisse son propre nom, mais tout de même, il maudissait sa négligence. D'autant plus qu'elle avait rejoint les rangs de l'Ost Pourpre, la seconde épine dans son pied. Une coïncidence certainement, mais Lewis détestait les coïncidences.

Un vingtaine d'années auparavant, avec les autres membres du Cercle, il avait activement lutté dans l'ombre pour faire échouer toute tentative d'alliance entre leur royaume, Hurlevent, et les autres royaumes humains, sous l'égide de Lordaeron. Ils avaient été jusqu'à tuer pour ne pas être découverts, tous persuadés qu'ils perdraient leur force et leur rayonnement pour finir vassaux des Menethil. Une initiative qui avait fini par mourir d'elle même avec la chute de Lordaeron et le retrait de Gilneas, enfermé derrière ses murs. Plus personne depuis lors n'avait menacé la suprématie de Hurlevent sur le continent.

Lewis se leva à nouveau, incapable de tenir en place. Il saisit une affiche posée sur son bureau et déjà toute froissée d'avoir été lue et relue, et qui appelait la population à rejoindre "Les Fils de Nord", sous la direction d'Aurys de Nor Laedro, connétable de l'Ost Pourpre. Le voilà, le véritable danger. Une rescapée de Lordaeron essayant de recréer l'alliance entre les royaumes humains pour reconquérir son pays. Un bien piètre ennemi, sur le papier, mais dont l'influence ne pouvait plus être niée. Sa popularité ne cessait de croître, et de plus en plus de Hurleventins se considéraient désormais comme des Fils du Nord. Inacceptable. Le Cercle devait-il être reformé? Sans doute pas encore, les forces réprouvées en place n'étaient pas prêt d'être délogées. Mais le roi Varian étai bien trop tolérant avec cette femme qui pillait leurs ressources pour ses objectifs personnels, et détournait les citoyens de leur devoir.

Tandis que Lewis rageait ainsi, impuissant, encore une fois sur le pont de déchiqueter l'ignominieuse affiche de propagande, on frappa à sa porte.

Il aboya: "Entrez"

Un valet ouvrit prudemment et fit un pas à l'intérieur.

" Un colis a été livré pour vous messire Terrheim"

Congédiant le serviteur d'un geste de la main, Lewis saisit le paquet et déchira fébrilement l'emballage. Un sourire, le premier de la journée, fleurit sur ses lèvres.

"Enfin" murmura-t-il "Nous allons voir si les Fils du Nord résistent à ça…."

Il tenait un livre signé Emaëlle Lesteplume, une journaliste inconnue et pétrie d'ambition prête à tout pour se faire un nom. Et il y avait fort à parier que son nom allait bientôt être sur toutes les lèvres. Le titre du livre: La Louve de Lordaeron - La vérité sur Aurys de Nor Laedro.

Il feuilleta les premières pages, puis s'assit et reprit son verre pour terminer confortablement - cette journée valait finalement bien sa meilleure bouteille.

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Aurys
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Message par Aurys »

Le livre n'était pas parvenu immédiatement aux oreilles d'Aurys : à la suite d'une chasse à l'artefact troll qu'elle avait menée à titre privé aux Hinterlands en compagnie de la Boussole aux Chimères, la Connétable avait pris en effet quelques jours au Nid-d'Aigle pour profiter de ses amis Marteaux-Hardis et pour s'assurer de leur rôle dans la guerre à venir, d'autant que les réprouvés avaient débuté l'invasion de leur patrie en y installant des centres de recherche sur la nouvelle peste.

Ce n'est donc qu'au bout d'une petite semaine que, rentrant enfin à la Garnison, son regard tomba sur l'ouvrage qui faisait tant gloser à Hurlevent.

Son existence ne la surprit pas : elle avait en effet accordé à la journalise en question un long entretien quelque temps auparavant, afin de servir de contenu à un tel opus. Le contenu, en revanche, était d'un autre tonneau : les réponses qu'elle avait faites étaient tout simplement tronquées, détournées, voire remplacées par des propos qui ne pouvaient que la présenter comme une personnalité tortueuse et dangereuse.

Aurys se cala au plus profond de son fauteuil pour relire les passages les plus croustillants du livre. Quelle vie trépidante on lui faisait vivre ! L'ouvrage, dans sa fantasie, n'était pas sans mérite, et la Connétable rit à plusieurs reprises devant des contre-évidences énoncées avec un enthousiasme presque enfantin. Elle s'était faite avoir par la journaliste, c'était un fait. Il fallait être beau joueur. Sans doute le livre apporterait-il quelque eau au moulin des opposants les plus fervents à son oeuvre, ici, à Hurlevent. Mais à tout prendre, son impact serait probablement limité : il se pouvait même qu'il raffermisse le sentiment d'unité des gens du Nord face à l'arrogance dont faisaient preuve les Hurleventins dans le traitement de l'une des leurs.

Finissant la lecture, elle se demanda ce que ses hommes avaient pu en passer - Lomah la première.
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Augustus V. Lutgardis
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Message par Augustus V. Lutgardis »

A Hurlevent, l'air était paisible et propice à la ballade et aux déambulations. Augustus avait obtenu sa journée en effectuant une nouvelle course pour son suzerain le trésorier, et n'en s'en plaignait absolument pas. Bien qu'il était toujours ravis de pouvoir aider au Bastion, un peu d'air frais ne pouvait que le raviver. Il longeait tout d'abord les canaux du quartier commerçant jusqu'à ce qu'un étalage d'extérieur, devant une libraire, n'attire son attention. Un peu de lecture, voilà de quoi meubler la journée! Il scruta le nom des livres stars mis en vente et le titre de l'un d'entre eux attira plus particulièrement son attention. Ledit livre présentait en première de couverture : «La Louve de Lordaeron - La vérité sur Aurys de Nor Laedro». Une biographie sur la Connétable? Lorsqu'il se saisit du livre et qu'il vint le payer au libraire, il repensa à cette soirée à Forgefer, la Veillée des Contes. Pendant la première partie de celle-ci, une dame du nom d' Emaëlle Lesteplume s'était présentée -et rendait flopées de sarcasmes lors d'échanges venimeux avec la Connétable- , et c'est ce même nom qui apparaissait sur le livre. Sa curiosité piquée à vif, il marcha à grands pas jusqu'à la Place de la Cathédrale, et s'assit sur un banc à côté de la fontaine pour entamer la lecture.

Durant cette dernière, deux expressions passèrent sur son visage : la dérision, puis l'inquiétude. Il ne connaissait pas grand-chose de la vie d'Aurys, mais il était clair que la plume qui rédigea ces lignes était mue par une main scandaleusement subjective et des idées clairement calomnieuses. Certain passages sur l'Ost Pourpre déformaient un peu trop la réalité des choses à son goût. L'inquiétude qu'Augustus ressentait se nourrissait de la propension publique, de la libre distribution de l'ouvrage, et des probables surexcitations nouvelles chez les opposants à la Connétable, puis aux Cloches Pourpres, puis aux Fils du Nord. Ce sursaut, l'impact de ce livre dans le peuple Hurleventois pouvait être anticipé, mais l’épreuve sociale qui en résultera affectera sans doute le moindre Fils du Nord vivant sur les terres de l'Alliance...

Refermant le livre, et le rangeant dans sa veste, Augustus crut bon de ramener son exemplaire au Bastion. Chemin faisant, certains passages lui revinrent à l'esprit, aussi désagréables qu'une nuée de mouches prompte à résiste à des gesticulations visant à les chasser.
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Lomah de Sangre
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Re: Dans votre librairie dès aujourd'hui

Message par Lomah de Sangre »

La plateau du petit déjeuner fumait encore sur la table basse des appartements privés de la Chambellan Lomah de Sangre : Un café -coupé à l'eau de vie-, une assiette de brioches au lait d'ânesse-Que Deirdre s'appliquait à dépiauter pour donner l'illusion qu'elles avaient été consommées de moitié-, un jus d'orange. La baronne, enveloppée dans un peignoirs de soie sauvage à la mode elfique, ouvrait son courrier et prenait le pouls des nouvelles du jour à travers une sélection de journaux venant de tout Azeroth. Cependant elle les délaissait aujourd'hui à la faveur d'un livre, empaqueté et envoyévanonymement à son nom, ici au bastion, dont la lecture semblait la faire sourire.

«La Louve de Lordaeron - La vérité sur Aurys de Nor Laedro».

Ainsi s'intitulait le torchon en question. Mais un torchon soigneusement écrit par une plume habile et visiblement financée par un mécène pétri d'un amour immodéré pour l'Ost Pourpre. Plusieurs noms lui traversèrent l'esprit, mais rien ne pouvait étayer solidement les élancements de son instinct. Aussi referma-t-elle le livre, but une gorgée de café brulant et dit calmement à Deirdre.


- Appelle moi Augustus, j'ai une mission pour lui...
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Onagre
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Re: Dans votre librairie dès aujourd'hui

Message par Onagre »

Ce matin là Onagre prenait son petit déjeuner à l'auberge où elle logeait encore pour quelques jours. Malgré l'heure plutôt matinale, le brouhaha des habitués de l'auberge avait déjà commencé, et c'est dans les rires tonitruants à des blagues qui auraient mérité que leurs auteurs se fassent laver la bouche au savon que la femme buvait son thé.

- "Outch... trop chaud" grommela t'elle en se mordant la lèvre.

Elle se dirigea vers une vieille table au fond de la salle, sur laquelle trônaient divers journaux, la plupart passés de date, et autres brochures. Dans ce fouillis elle trouva le livre dont les rumeurs un peu folles de ces derniers jours vantaient les qualités. "Des tas de révélations" avait-elle entendu au détour d'une conversation.

Curieuse, elle reprit place sur son fauteuil de bois, saisit sa tasse d'une main et commença sa lecture.
Un air amusé se peignait sur sa figure. Ne connaissant pas encore très bien certaines personnalités de l'Ost, il lui paraissait drôle de lire autant de "gentillesses" à leur égard, c'était "gros comme une maison". L'ouvrage était de plus très bien écrit, ce qui rendait sa lecture encore plus croustillante.

A peine eut-elle tourné la troisième page que son regard fut attiré par un mouvement étrange là sur sa table.
Un cafard, gros comme le poing, traversait tranquillement, prenant soin de patauger dans son assiette de gaufres au passage.

En un éclair, juste le temps de pousser un cri écoeuré - BEUHAAAAAEUUURG! - le livre fut brandit et sa couverture épaisse s'abattit à toute valdingue sur la pauvre bête dans un bruit dégoutant de carapace et assiette brisées.

Les rires gras cessèrent un instant. Du bout des doigts, et avec une moue écoeurée, Onagre tendit le bouquin suinteux d'entrailles, de miel et de bouillie de gaufre, à la serveuse qui restait plantée à deux pas de la table, les bras ballants, visiblement très gênée par la présence de l'insecte dans l'établissement, surtout à la vue de tous les clients.

C'est ainsi que cet exemplaire de La Louve de Lordaeron - La vérité sur Aurys de Nor Laedro finit à la place qui lui était destinée : la poubelle.

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Tremere
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Re: Dans votre librairie dès aujourd'hui

Message par Tremere »

Tremere se dandinait d'un pied sur l'autre dans la salle du trone, très mal à l'aise. Son plan était génial et audacieux, comme tous ceux qui avaient germé dans son esprit, mais le génie est parfois méconnu, même de manière posthume, et le réprouvé ne l'ignorait pas.

Face à lui, Sylvanas relisait les parchemins que le mage lui avait amenés. La voix de la reine banshee était plus glaciale que les vents du Norfendre quand elle brandit les papiers.

"Et c'est ça, ton plan ? Leur envoyer un humain dédié à notre cause, affirmant qu'il vient du futur depuis les grottes du temps, un futur dans lequel les Fils du Nord ont été balayés par les réprouvés?"

Tremere aurait volontiers dégluti s'il avait encore eu les muscles nécessaires à cette délicate opération.

"C'est un résumé un peu..." il allait dire 'grossier', mais ne souhaitant pas l'être envers sa suzeraine, il se ravisa au dernier moment.

"... court, mais l'idée est là. On pourrait faire passer cette personne pour l'un de leur descendants, ça ajouterait un peu de piment à la chose. Imaginez, le fils de Lor Naedro, arrivant du futur pour leur annoncer qu'ils ont tous péri dans d'atroces souffrances en tentant de reprendre leur chère patrie. Après ça, ils seront assurés que leur plan est voué à l'échec, et ils devront en organiser un autre, ce qui, j'en suis certain, leur fera perdre un temps précieux. Ou alors, encore mieux, ils perdront tout espoir et les Fils du Nord se disperseront."

La réponse de la souveraine de Fossoyeuse fut cinglante :

"Les vers t'auraient-ils définitivement bouffé la cervelle, Tremere? Croix-tu vraiment que des gens si déterminés se laisseraient berner par une histoire aussi abracadabrante ? Dois-je compter toutes leurs exactions à notre encontre?"

"Hé bien... c'est que... ce sont les grandes lignes, ils faudrait peut-être encore paufin..."

"Silence ! Ce plan est complètement idiot. Hors d'ici, et ne reparait devant que moi que lorsque tu auras une idée qui a des chances de fonctionner. Ne me déçois plus."

Tremere s'inclina et fit demi-tour. Il dut résister de toutes ses forces pour ne pas se téléporter en direction de la sortie et marcha d'un air aussi décontracté que possible. Une fois dans le couloir, il se détendit un peu. Un nécrogarde eut un ricanement discret au moment où Tremere passait devant lui. Le mage baissa la tête, encore plus penaud. Ces derniers temps, aucun plan ne semblait trouver grâce aux yeux de Sylvanas ou de ses conseillers. Il regagna son office, sur lequel ses espions avaient déposé les dernières nouvelles. Des affiches de propagande des Fils du Nord, un rapport sur la présence non confirmée d'un guerrier de l'Ost du coté d'Arathi, et un livre au titre haut en couleur.

"La Louve de Lordaeron - La vérité sur Aurys de Nor Laedro" crut-il lire à haute voix. La langue commune lui était impraticable, les cordes vocales atrophiées des réprouvés les avaient privés à jamais de la possibilité de la parler. De fait, le bas-parler était du commun, mais tellement abâtardi par la décomposition qu'il en devenait méconnaissable. Curieusement, ça ne posait pas de problème aux réprouvés pour se comprendre. Et heureusement pour le reste de la Horde, le langage orc était presque aussi guttural que le bas-parler, ce qui leur permettait de la parler.

Si Tremere avait su lire de son vivant, peut-être se serait-il rappelé cette langue. Mais il avait été un simple paysan, et l'érudition n'était pas pour ceux de son espèce. Ce n'est qu'une fois mort que son intelligence avait pu s'exprimer pleinement, et dans son désir de mieux comprendre ses ennemis, le mage avait appris la langue commune. Il entama donc la lecture, tout en imaginant ce qu'il contenait. Peut-être y avait-il là de quoi élaborer un plan qui trouverait grâce aux yeux sans vie de sa souveraine.
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Augustus V. Lutgardis
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Re: Dans votre librairie dès aujourd'hui

Message par Augustus V. Lutgardis »

Deirdre ne tarda pas à trouver le jeune Augustus von Lutgardis, qui, au-dehors, manches de son habit blanc retroussées, était en train de remplir sa fusée de carburant. Toutes ces allées et venues pour le Trésorier, d'hôtel de vente en hôtel de vente fatiguait énormément la machine. Fort heureusement, Tellxeios avait eu la bonté d'âme de donner de temps en temps une subvention visant à entretenir la machine. En effet, la vitesse de pointe de l'Hidenburg rivalisait avec les plus grands griffons! Ou tout du moins la fiabilité de la machine favorisait les commerces. L'écuyer salua la naine approchant, familier à sa présence dans le bureau de la Chambellan. Sa venue ne pouvait annoncer qu'une seule chose, et il se débarrassa promptement de son activité mécanique et hautement manuelle (on ne peut pas trop lui en demander, voyez-vous). Ce qu'il avait déjà mis suffirait à effectuer quelques vols.

Il suivit alors la naine dans les couloirs de la Garnison, gravirent les marches et une fois que la naine s'assura auprès de la Chambellan qu'elle voulait bien le laisser entrer, il lui emboîta le pas et pénétra dans la pièce. Son regard fit le tour de la salle, comme une habitude, et se posèrent ensuite directement sur les yeux ardents de la Dragonne Rousse. C'est avec son air stoïque et les bras nus, propres mais avec une odeur typique des ingénieurs de carburant, qu'il inclina sa tête.

«Bonjour Chambellan. Que puis-je faire pour vous?»

Lorsqu'il se rendit compte qu'il avait oublié de remettre ses manches, un petit juron intérieur fut poussé. La situation et le protocole ne lui permettrait pas la familiarité de s'absenter pour remettre ses manches et faire partir l'odeur avec un quelconque parfum!
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Lomah de Sangre
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Re: Dans votre librairie dès aujourd'hui

Message par Lomah de Sangre »

Je croise les jambe en m'installant un peu plus confortablement dans mon fauteuil. Malgré ma mise, je perds rien de ma prestance. J'avise le paquet qu'Augustus porte sous le bras et jette négligemment mon exemplaire de la "Louve de Lordaeron" sur la table basse qui nous sépare.

- J'imagine que vous avez déjà pris connaissance du contenu de ceci ? Plusieurs exemplaires ont été envoyés anonymement aux membres de notre état major. J'imagine qu'il inonde déjà les rayons des librairies hurleventines ? Que pensez-vous de son contenu ?

J'affiche alors un sourire amusé et le prenant à brule pourpoint je lui lance :

- J'aime beaucoup votre nouveau parfum, mon chéri. Comment ne pourrais-je apprécier la senteur exquise de produits hautement inflammables...?
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Augustus V. Lutgardis
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Re: Dans votre librairie dès aujourd'hui

Message par Augustus V. Lutgardis »

Le tenue de la Baronne de Sangre ne rappelait que trop à Augustus qu'il avait beau être debout et elle assise que c'était la présence de la femme qui dominait, qui embaumait la pièce. Son habituelle droiture et sa raideur ne laissait rien paraître au léger malaise intérieur qui s'immisçait en lui. La dragonne rousse le considérait néanmoins et semblait l'avoir convoqué pour une affaire d'une certaine importance : le livre sur la table basse attira un moment son regard. Il se remémora rapidement quelques passages du livre assez pernicieux, ce qui lui fit tirer une moue à moitié masquée, trahissant d'ors et déjà ses a priori sur l'ouvrage.

«J'ai en effet déjà eu l'occasion de m'en procurer un exemplaire et d'en faire la lecture. Comme vous le supposez bien, ce livre est présent au-devant des grandes bouquineries et libraires de la capitale, et plusieurs passants étaient attirés par sa couverture.»

Il marqua une pause, cherchant les mots juste pouvant définir clairement ses pensées sur le fond de ce livre.

«Je pense volontiers qu'il s'agit là d'une pique savamment dissimulée envers la Connétable et envers l'image de l'Ost Pourpre. La population, friande de commérages et de rumeurs, devrait y trouver son lot de ragots et de scandales. Scandale que j'ai moi-même ressentis de mon propre point de vue. J'ai trouvé d'un côté un certain amusement à voir de telles tournures et arrangements avec la.. vérité. Mais d'autre part, son contenu m'a plutôt inquiété sur les retombées possibles sur la société. Il suscitera sans doute un engouement nouveau envers ceux qui pensent que notre cause n'a rien à faire ici.»

Et comme naturellement, la petite remarque de la Chambellan ne l'avait pas laissé indifférent, il s'indigna, quelque peu humilié.

«Je suis ravis qu'il vous plaise, mais hélas, je compte bien à ce qu'il soit temporaire. Et je serais d'autant plus ravis de constater que l'odeur ne vous ai pas encore donné l'envie de m'allumer comme une vulgaire torche.»

Un petit sourire nerveux se dessina au coin de ses lèvres.
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Lomah de Sangre
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Re: Dans votre librairie dès aujourd'hui

Message par Lomah de Sangre »

Je m'étale d'avantage dans mon fauteuil à la manière langoureuse d'un chat.

- Trêve de badinages, mon chou... Il va me falloir en savoir plus sur notre écrivaillone. Je veux tout savoir sur Emaëlle Lesteplume : son éditeur, ses publications, sa réputation, ses habitudes d'écriture et d'investigations, sa vie privée... Et surtout pistez moi ses mécènes. On ne sort pas son cul de sous la presse juste avec une verve acérée. Elle doit avoir une source de financement et mes avis que cette "source" est des plus intéressées.


Je regarde mon secrétaire particulier.

- Il est inutile de vous préciser de rester discret...

Puis je retourne à ma lecture et comme je constate qu'Augustus est toujours planté là j'ajoute :

- Allez, Ouste ! Au travail !

[HRP : Je te laisse le soin de régler les modalités de ton enquête avec Emaelle. Vous êtes libres de le développer à la suite, ou de me faire un rapport direct pour aller plus vite. Au choix !^^]
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Augustus V. Lutgardis
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Re: Dans votre librairie dès aujourd'hui

Message par Augustus V. Lutgardis »

+ musique +

Les commandements de la Baronne de Sangre avaient été très clairs : dresser le profil complet de l'écrivain et puis débusquer le commanditaire du livre qui allait sans doute faire des dégâts. Cela faisait maintenant plusieurs heures qu'Augustus avait quitté le Bastion de l'Ost Pourpre pour se retrouver dans la forêt, seul, dans une petite clairière. Il fallait commencer par connaître l'adresse d'Emaëlle Lesteplume, et sans attirer les soupçons qui plus est. Et un démoniste tel qu'Augustus Von Lutgardis savait très bien comment opérer.

Sa tenue noire impeccable -qu'il avait changé auparavant- voletait au gré d'un vent léger. Il était tard, la nuit tombait. Les traits de son visage étaient fermés, seule sa bouche semblait être en mouvement. Des paroles prononcées aussi fortement qu'un chuchotement dans un langage quasiment incompréhensible. Mais ses paroles donnaient une teneur à l'air, un senteur presque de... pourris. Les yeux du jeune von Lutgardis se fermèrent subitement, alors qu'une orbe de la taille d'une balle de Falla'andu se matérialisait devant lui. Puis, l'air s'alourdit douloureusement, une fente creusa l'orbe comme une pupille s'ouvrant. Et en effet, c'était la formation d'un véritable Oeil, commençant à mouveoir légèrement. La conscience d'Augustus était profondément cachée à ce moment là, tandis qu'il avait conféré son sens de la vue à une entité démoniaque. Et tout aussi rapidement que l'oeil s'était formé, il disparu, happé par les Ombres.

Emaëlle Lesteplume. L'oeil guida sa vue jusqu'à l'auteur du livre calomnieux, l'épiant depuis les airs, caché dans son linceul démoniaque. Puis, la connexion fut rompue à l'instant où elle pénétrait dans une maisonnée du Quartier Commerçant. Augustus revint brutalement à lui, comme s'il revenait de loin. Il tomba à la renverse, et ses mains cherchaient désespérément des points d'accroche à sa nouvelle perception. Il saisit quelques touffes d'herbes entre ses doigts, ses yeux roulaient dans ses orbites furieusement, et de manière brutale, s'immobilisa.

Un instant de silence.

Puis un nouveau mouvement. Plus souple, plus humain. Le gilnéen se relevait lentement, en pleine possession de ses moyens. Le contrecoup avait été rude, mais l'information était en sa possession. Il irait investir les lieux le lendemain.

-----------------------------------------------

+ musique +


Les instants de midi étaient passés, le soleil inondait les rues d'Hurlevent, bondées de peuple courant de l'hôtel de vente vers la banque ou une boîte au lettre, ou bien simplement faisaient une ballade digestive dans les rues animées de la capitale humaine du Sud. Au milieu de cette foule tant diverse et variée, un haut-de-forme noir allait d'allées en allées. Inaperçu dans la grande mixité des habitants de la ville ! Augustus, propriétaire de ce chapeau, s'arrêtait alors en face d'une bâtisse qui avait un air de déjà vu. Bien entendu, il savait déjà ce qu'il venait faire ici. Il s'arma de son plus grand sourire et frappa à la porte. Pas de réponse immédiatement. Il sourit à l'idée qu'Emaëlle ne puisse pas se présenter, cela faciliterait les investigations dans ses appartements. Alors qu'il songeait à forcer doucement la porte, cette dernière s'ouvrit à la volée sur une vieille femme d'un certain âge.

«Bonjour Monsieur! C'est pour?» questionna la dame âgée.

«Bonjour Ma Dame, je suis James Watson, et je suis un grand admirateur du travail de Madame Lesteplume!» Il avait trouvé son identité au fin fond de son imagination, mais l'alibi lui semblait correct.

«Enchantée monsieur Watson, je suis Tara Arban. Emaëlle n'est pas là pour l'instant, mais peut-être désirez-vous entrer et prendre le thé en attendant son retour?» proposa-t-elle.

«Ce serait avec grand plaisir.» Dit-il en répondant au sourire de la vieille femme.

Augutus de s'installer dans une petite cuisine de rez-de-chaussé, en sa nouvelle compagnie.

«Pouvez-vous me parler un peu plus d'elle? Je serais ravis d'en savoir un peu sur elle! Décrivez-moi son caractère?»

«C’est une gentille fille, elle a toujours un moment pour discuter avec moi. Elle fait pas d’histoires, elle passe beaucoup de temps dans sa chambre, que je lui loue, à écrire. Je sais qu’elle est journaliste, elle m’a montré certains de ses articles. Elle travaille pas pour un journal en particulier, elle vend ses papiers à ceux que ça intéresse. C’est pas mal c’qu’elle fait j’trouve.»

«Vous lui louez une chambre ici? En savez-vous un peu plus sur ses origines? Et sa situation actuelle?»

«Ça fait un an qu’elle est arrivée, ses parents vivent aux Carmines. Elle avait une lettre de recommandation d’un ancien locataire à moi. Et pis, vous savez.... Elle n’a pas beaucoup de moyens mais elle paye régulièrement son loyer, alors j’l’invite souvent à dîner. Elle m’a dit y a pas longtemps qu’elle avait une occasion d’se faire de l’argent et de dev’nir célèbre. J’suppose qu’elle parlait du livre qu’elle a écrit.»

«Ce livre?» fit le jeune homme en sortant de sa veste le fameux ouvrage, le montrant à la vieille femme, avec un sourire éclatant. «Qu'en pensez-vous?» Rajouta-t-il, les yeux pétillant de malice.

«C’que j’en pense ? Pas grand-chose, j’la connais pas moi cette Aurys. Mais si c’est vrai c’quelle raconte, j’espère qu’le roi va faire quelque chose...»

«Vous avez raison.» Confirma Augustus, dans la confiance de la vieille femme. «Et vous a-t-elle déjà présenté des amis? Des proches?» Ajouta-t-il finalement, l'air serein.

«Des amis ? J’sais pas, elle n’a jamais ramené personne ici, de toute façon je lui ai dit le premier jour : pas de garçon dans cette maison ! Hon hon! Et sinon, elle va souvent à la Rose Dorée, à côté de la banque. J’suppose qu’elle a des amis là-bas. »

Augustus nota mentalement tout ces détails, avant de passer à la deuxième partie de son plan.

«Puis-je monter voir ses appartement?» Fit-il avec un sourire innocent.

«Bah! Bien sûr que non! Vous ret'nez pas ce que je vous dis? Pas de garçons ici!» Fit-elle, à mi-chemin entre le rire et l'énervement.

«Désolé.» répondit-il avec une mine déçue. Il se leva de sa chaise, ayant finis sa tasse de thé, et remis son chapeau sur la tête. «Je vous remercie de m'avoir parlé d'elle un peu, madame Arban. Je vais essayer de la croiser en ville, désormais! Passez une bonne journée!»

La vieille femme, quelque peu surprise par ce départ digne d'un jeune tourtereau en quête de son amour, lui fit un vague signe de la main, et quand il fut partit, se remémora la glorieuse époque de ses vingt ans, où de charmants jeunes hommes venaient lui faire la cour, à elle aussi...
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«Que mon sourire dissimule un sabre, à chaque fois que ma passion me touche...»

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Augustus V. Lutgardis
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Re: Dans votre librairie dès aujourd'hui

Message par Augustus V. Lutgardis »

+musique+

C'est dans sa démarche assurée et presque guillerette qu'il arriva à la porte de la Rose Dorée. Les passants étaient vraiment très nombreux dans cette rue, et il a du faire attention au moindre pas et anticiper les mouvements des personnes autour de lui pour être le moins bousculé, écrasé possible. Quelle idée de se trimballer en dragon en pleine rue, sérieusement? Ôtant son haut-de-forme, il pénétra dans l'auberge où il fut accueilli par la tenancière, toute sourire de voir un individu présentant le minimum de tenue et de propreté -elle était las de ces voyageurs vagabonds avec les chausses pleines de boue ou pire- .

«Bonjour et bienvenue à la Rose Dorée! Que puis-je faire pour vous?»

«Bonjour Madame. Je prendrais simplement un siège, j'attend quelqu'un.»

«Oh bien, veuillez me suivre.»

Alors qu'ils traversaient la grande salle du rez-de-chaussée, Augustus eu le temps d'observer les personnes déjà en présence. Deux dranaeï obèses discutaient de cuisine, une femme passait le balais en respirant péniblement et un homme d'âge mûr peu après suivis de ce qu'il lui semblait être une fille de joie de luxe descendirent les escaliers. Peut-être l'étage était-il plus occupé et plus vivace que la réception. L'aubergiste lui présenta un jeu de chaises, chacune tournée vers l'autre, dans un coin de la salle. Augustus paya son service d'un sourire et interpella la dame avant qu'elle ne s'en aille vers son comptoir.

«J'attend miss Lesteplume. Vous la connaissez? Vous savez si elle viendra aujourd'hui?» Annonça-t-il d'un air gêné. «Car en fait j'ai appris qu'elle fréquentait l'endroit par un ami et elle me plait beaucoup...»

« Oui je vois très bien de qui vous parlez, elle passe beaucoup de temps ici. Ne vous inquiétez pas, je suis sûre qu'elle passera! Mais peut-être n'aura-t-elle pas de temps à vous accorder...» Répondit-elle avec un petit sourire qui se voulait taquin envers Augustus.

«Vraiment? Pourquoi? Elle doit rejoindre des amis?» fit-il, l'inquiétude se mêlant habilement au désespoir dans sa voix.

« Je ne dirais pas qu’elle a des amis, plutôt des connaissances. Elle parle à beaucoup de monde pour son travail. Je vous avertis, elle assez aimable avec les humains de Hurlevent, beaucoup moins avec les étrangers.» Dit la femme, soupesant du regard l'homme aux autours gilnéens. «Pour tout vous dire, je ne l’aime pas beaucoup. Mais c’est une bonne cliente alors je reste polie.»

«Ho... Vous.. vous avez remarqué une de ses habitudes de travail? J'aimerais vraiment savoir comment elle fait pour écrire d'aussi bons articles!» Tenta-t-il.


«Elle ne note jamais rien mais j’ai déjà vu des bouts de conversations utilisés dans ses articles. Du coup je fais attention à ce je dis devant elle… » Répondit la tenancière, après avoir jaugé un instant la question.

Et l'aubergiste de s'incliner avant de partir hâtivement vers toute une délégation de gnomes qui fit irruption bruyamment dans la taverne. Augustus aurait aimé en apprendre plus sur le genre de personnes qu'elle rencontrait ici, ce qu'elle commandait, quel crédit apportait-elle à sa fonction, mais on ne peut pas tout avoir du premier coup.... Profitant de cette diversion chaotique, il se leva et ni une, ni deux, il se retrouva au dehors, alors qu'il entendait les employés pester contre la saleté du cambouis, les bruits explosions et les traînées de fumée que laissaient les gnomes dans leurs sillage.

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Un quart d'heure plus tard.

Ses pas le conduisirent jusqu'au port, à côté de la plus grande statue de lion, dominante de toute sa hauteur et regardant d'une air sévère mais protecteur les riverains, ouvriers, et navires allant et venant. Il regardait d'un air lointain le livre qu'il tenait en main. «La Louve de Lordaeron : toute la vérité sur Aurys de Nor Laedro.». En lisant et relisant le titre, il se disait qu'il pouvait interroger la Connétable sur les circonstances et le déroulement de sa rencontre avec Emaëlle Lesteplume. L'idée trottait paresseusement dans sa tête, comme si une partie instinctive de lui-même se disait que cela n'allait servir à rien. Il lui manquait quelque chose, c'était indéniable. Un dernier élément qui lui semblait plus ou moins ressortir que les autres. Il se résuma ses informations.

Emaëlle Lesteplume apparaît souvent à la Rose Dorée. Y figure comme une bonne cliente, néanmoins tendance à la xénophobie. Originaire des Carmines. A été recommandée pour louer une chambre en pleine ville... Louer une chambre? Augustus leva un sourcil. A y penser, Emaëlle Lesteplume n'a jamais été décrite comme étant une personne aisée. Au vu de la maison de madame Arban, peut-être était-ce une résidence proposant une chambre pour ceux qui avaient du mal à joindre les bouts. Il convenait que le métier de journaliste pouvait être hasardeux en matière de salaire. Si elle ne vend pas d'article, elle n'a pas d'argent. Continuant sur cette piste, il continua à réfléchir, regardant d'un air inquisiteur le livre qu'il avait en main, comme s'il détenait sans le vouloir toutes les réponses à ses interrogations.

Il fallait qu'il se souvienne. Le premier jour où il a vu et lu ce livre. Il passait le long des Canaux jouxtant le quartier commerçant et avait aperçu l'ouvrage sur un étalage au-devant d'une librairie. Une librairie, bien. Il y avait plusieurs vingtaines de ces livres en évidence. Et peut-être plus en rayon dans la boutique. Il avait également noté qu'une autre librairie vendait le livre.

Livres, étagères, présentoirs, librairies, boutiques. Pluriel. Plusieurs. Beaucoup.

Un déclic sembla fasciner Augustus un court instant. Il observa le livre d'un autre regard, plus profond, plus perçant. Au lieu de dégager une réponse de ses souvenirs, il dégagea les bonnes questions. Ce qui était d'autant plus pratique. Qui a tiré ce livre en autant d'exemplaire? Au vu de ses moyens, comment Emaëlle Lesteplume a-t-elle put payer ce service? Le jeune von Lutgardis prit le livres dans ses deux mains, et commença à le feuilleter comme un dément, ses yeux parcourant non pas les lignes qui constituaient le texte, mais le papier. C'est avant la quatrième de couverture qu'il mit le doigt sur des petits caractères, écrits si discrètement qu'il lui aurait été impossible d'apercevoir à la fin de sa première lecture de l'ouvrage. Rangeant l'exemplaire dans son manteau, il se mit à marcher d'un pas sûr vers l'adresse qu'il avait lue.
Imprimerie Doublevis.
Hurlevent, Vieille Ville.

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L'après-midi se terminait à son rythme, les riverains sortaient des commerces et de leur postes de travail, et regagnaient tranquillement leurs pénates. Traverser transversalement Hurlevent pour apprécier ce spectacle, comme voir les engrenages d'une horloge tourner avec minutie, dans la plus grande clarté, était sans nul doute un des aspect préféré de la Capitale pour le jeune gilnéen. La Vieille Ville jouissait d'un arrangement particulier, et était reconnaissable à ses bâtiments aux tuiles rouges et sombres. Les maisons s'étaient entassées les unes contre les autres, laissant des ruelles étroites et une hygiène parfois douteuse. C'est en s'engageant dans une parallèle à l'axe principal de ce quartier qu'Augustus arrivait à destination. Le panneaux grinçaient en se ballottant lorsque le vent léger s'engouffrait dans la misérable ruelle. Le jeune von Lutgardis huma l'air un moment pour en capter les odeurs. Des flagrances de papier chaud et d'encres s'opposaient avec force à une humidité extérieure. Apparemment, il y avait toujours de l'activité à l'intérieur, et ses doutes se confirmèrent lorsqu'il ouvrit la porte principale pour se retrouver projeté dans un petit vestibule, où un bureau avait été installé pour un gnome. Ce dernier, y travaillant, s'exerçait à faire de nombreux calculs en jouant avec des pièces d'or d'une main.

Augustus dévisagea prudemment la créature du regard. Il avait l'air plutôt jeune... ou plutôt vieux, c'était dur à définir. Il avait des rides que l'on pouvait retrouver chez le Sire Dourentée, mais en même temps, présentait l'énergie et la coupe de cheveux fraîche d'un Sir Deux-Fois. Il fit un nouveau pas, par prudence, alors qu'il entendait au loin des bruits de machinerie tourner avec force. Sans doutes était-ce dans la pièce qui se trouvait derrière une des deux portes du vestibule.

«Bonsoir. Je suis bien aux Imprimeries Doublevis?» Commença-t-il, avançant de plus en plus vers le bureau gnomique.

Le gnome au travail finit d'un trait ce qu'il avait entreprit d'écrire et releva hâtivement son visage vers le gilnéen, le gratifiant d'un sourire accueillant et commerçant.

«Pour sûr, l'ami! Je suis Prachi Doublevis, et je dirige ces Imprimeries. Que puis-je faire pour vous?»

Très bien, au moins le gnome ne s'était pas empressé de lui demander son nom ou ces autres détails qui auraient pu gêner son enquête. Répondant à son sourire, le jeune von Lutgardis reprit :

«J'aimerais savoir si Emaëlle Lesteplume était passée ici? La connaissez-vous?»

« Oui je m’en souviens très bien, vous pensez. Elle s’est pointée avec un sac d’or, j’en avais jamais vu autant ! J’ai dû arrêter toutes mes activités pour sortir des centaines de son bouquin en quelques jours. Je ne sais pas d’où elle sortait tout ce pognon, elle avait pas l’air si riche. Mais moi, si on me paye, je fais mon boulot et je pose pas de questions ! Hahah! » dit le gnome avec une rapidité phénoménale.

Augustus grimaça presque, tâchant d'emmagasiner toutes les informations que le gnome bavard avait débité en un instant. Son expression s'était bien entendu figée dans un sourire de politesse et de satisfaction, et quand il fut remis de cette première épreuve auditive, il poursuivit :

«En parlant de votre travail, Monsieur Doublevis, quelles étaient ses exigences? Y avait-il des demandes particulières?»

«Hm...» Le gnome sembla réfléchir un instant, fouillant dans sa mémoire labyrinthique. « Je me suis aussi occupé de le distribuer à toutes les librairies de la ville. Elle m’a donné une liste de gens à qui l’envoyer gratos. Bizarre moi j’vous dis, c’est pas comme ça qu’on rentre dans ses frais. Surtout que le prix de vente demandé était trop bas par rapport au prix de l’impression.»

Une liste? Ce gnome disposait éventuellement d'une piste intéressante, mais il préféra l'écarter. Sans doutes était-ce pour montrer le fruit de son travail à quelques unes de ses connaissances ou patrons? Il mettra tôt ou tard la main dessus, pour le moment, des questions plus évidentes lui venaient à l'esprit.

«C'est étrange, elle n'était pas accompagnée lorsqu'elle est venue?» Poursuivit Augustus, profitant de sa veine d'avoir un gnome aussi bavard et peu regardant sous la main.

«Hé bien figurez-vous que non! Et puis, selon mon avis d'expert, ça se voit qu’elle faisait ça par elle-même. Si elle avait eu un éditeur ç’aurait pas été la même. Des requins ceux-là ! Elle, elle a rien négocié. Ça devait pas être son argent... Mais c’est quand même elle qui récolte les recettes il me semble! Les librairies lui envoient son dû sur chaque vente.» fit le gnome avec une nouvelle crise de rapidité, parlant avec beaucoup de gestuelle, assez pour hypnotiser les personnes les moins attentives.

Les informations données par le gnome faisaient corollaire avec les éléments dont il disposait déjà. Emaëlle Lesteplume vivait modestement, et ses premiers revenus ne pouvaient pas se permettre d'acheter les services d'une imprimerie. Il y avait donc un nouveau et mystérieux personnage qui avait financé la parution de ce livre. Un commanditaire, donc.

«...Elle avait l’air très contente de son coup, elle disait qu’elle allait être célèbre grâce à notre travail. Apparemment ça a l’air de marcher! Mais oh, je parle, je parle, mais je n'ai pas regardé l'heure. Diantre! Il est l'heure. Désolé monsieur, on ferme. Ouste!» Poursuivit le gnome, qui parlait toujours pendant qu'Augustus était dans ses pensées.

Le jeune gilnéen se contenta d'hocher la tête et de sourire, avant de tirer sa révérence et de tourner les talons. Il avait peut-être raté quelque chose en n'écoutant pas le gnome jusqu'au bout, mais l'élément clef qui en ressortait était mille fois plus satisfaisant. Et pour débusquer ce commanditaire, il allait devoir entrer en contact direct avec Emaëlle Lesteplume, cette fois-ci, qui était la clef de voûte de cette enquête. Alors que ses pas l'éloignèrent de la vieille ville et finalement d'Hurlevent pour rejoindre la Garnison du Ruisseau de l'Ouest, il se remémora les points les plus importants qu'il allait devoir consigner dans son rapport.

Le Soleil terminait enfin sa course quand le gilnéen s'assit derrière son bureau, où plusieurs parchemins attendaient sagement d'être noircis d'encre, d'annotations, et de schéma. Sa mémoire en plein exercice, il se mit à coucher sur le papier tout ce qu'il avait appris au cours de cette journée, et il enverrait ce rapport à la Chambellan avant les prochaines aurores.
«Que mon sourire dissimule un sabre, à chaque fois que ma passion me touche...»

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