[Candidature abandonnée]Dixit Froiderage.

[Froiderage]

Rapport d’Aedys Crachevin, agent du quatrième doigt. - 13/03/06

Objet : Surveillance du Chevalier Harek Malthorn, surnommé Froiderage.

Harek Malthorn, surnommé Froiderage, présente des états de service irréprochables. Nombreux faits d’arme, rapportés en annexe de ce rapport. A rejoint récemment la Main d’Argent. Affiche une détermination sans faille. Aucun écart prouvé. Pourtant, nom de sa famille mêlé à des affaires de corruption préoccupantes.

Ai recueillis les témoignages d’hommes directement sous ses ordres. Inspire crainte et respect. Meneur d’homme à l’influence grandissante. Pas d’ennemis connus.

Vie hors de la Main d’Argent : aucune relation connue ou soupçonnée avec membre du sexe opposé. Famille connue, passé lourd. Corruption, manipulations politiques. Amis peu nombreux car d’un naturel solitaire et taciturne.

Conclusion : comportement dans les normes de la Main d’Argent et particulièrement zélé. Suspect malgré tout car irréprochable compte tenu de son origine et du nom qu’il porte.


--Fin du rapport--

Rapport d’Aedys Crachevin, agent du quatrième doigt. - 18/07/06

Objet : Enquête au sujet des rumeurs entourant la vie privée de la Très Révérée Haute Inquisitrice Mysdemn Tourneverbe de la Main d’Argent.

Mission de filature accomplie avec succés. Ai découvert que la Très Haute masquait un état peu avancé de grossesse. La question de la paternité s’est posée. Réponse trouvée lors d’une rencontre nocturne avec le Chevalier Malthorn, surnommé Froiderage.

Discussion emportée. Froiderage fit preuve d’insubordination. Reproche à la Très Haute d’être tombée enceinte. Refuse qu’elle garde l’enfant.
La Très Haute évoque la possibilité d’abandonner ses responsabilités pour élever l’enfant. Le Chevalier Froiderage réprouve et renie leur relation.


--Fin du rapport--

Rapport d’Aedys Crachevin, agent du quatrième doigt. - 03/12/08

Objet : Enquête autour de la mort de Mysdemn Tourneverbe, anciennement Très Révérée Haute Inquisitrice de la Main d’Argent.

Cadavre retrouvé dans ses quartiers. Gorge tranchée. L’arme du crime dans sa main. Sang en abondance sur son visage, le haut de son buste et sa main. Thèse du suicide privilégiée.

Un témoin présent : enfant sans nom connu, agé de deux ans approximativement. Sexe masculin. Fils du Chevalier Malthorn, surnommé Froiderage et feu Mysdemn Tourneverbe. Muet.

Fouille approfondit de la pièce n’a révélé que très peu d’éléments concluants. Détail important malgré tout : liasse de papiers brulés dans l’âtre peu avant le suicide. Ai pu récupérer fragments. Correspondance. Ecriture familière, ai donc comparé avec archives. Le Chevalier Malthorn est l’auteur de ces lettres.

Fortes tensions dans les rangs de la Main d’Argent. Certaines personnes écoutent les rumeurs sur la vie privée de Froiderage.
Avenir de l’enfant incertain.


--Fin du rapport--

Rapport d’Aedys Crachevin, agent du quatrième doigt. - 10/01/09

Objet : Surveillance de l’Inquisiteur Harek Malthorn, surnommé Froiderage.

Enfant issu de la liaison entre Mysdemn Tourneverbe et le Chevalier Malthorn placée sous la garde de ce dernier.

Fait marquant : refuse obstinément de lui donner un prénom.
Rapports apparents froids et tendus.

Chevalier Malthorn ne parait pas affecté par la mort de Mysdemn Tourneverbe.


--Fin du rapport--

Rapport d’Aedys Crachevin, agent du quatrième doigt. - 22/04/16

Objet : Surveillance du Chevalier Harek Malthorn, surnommé Froiderage.

Le fils Malthorn, puisque c’est ainsi qu’il est nommé, entre en cycle d’entrainement auprès d’un tuteur engagé par son père : Vaelan Grisepeau. Enfant agé de 8 ans. N’a toujours pas prononcé le moindre mot. Sera forgé pour le combat.

Père absent. Rapports inexistants entre eux. Fils Malthorn tenu écarté du reste de sa famille. Le bâtard est traité comme une honte.

Chevalier Froiderage affecté à la direction d’un camp d’internement.

Méthode expéditive, violente. Preuve de pratiques régulières de la torture sur orcs emprisonnés. Craint par ses hommes. Dévôt, prie cinq fois par jour. Obsédé par sa mission. Exécution de prisonniers fréquente sous prétexte de mutinerie.


--Fin du rapport--

Rapport d’Aedys Crachevin, agent du quatrième doigt. - 29/08/19

Objet : Surveillance du Chevalier Harek Malthorn, surnommé Froiderage.

Affaire de corruption éclabousse le Chevalier Malthorn. Famille Malthorn entretient liens étroits avec maçons rassemblée sous le nom de « Confrérie des Défias ». Enquête en court par agent du premier doigt Vregan Brisetourbe. Premières preuves atterrantes.
Chevalier Malthorn n’affiche aucun trouble et dirige toujours camp d’internement. Rumeur de destitution prochaine.


--Fin du rapport--

Rapport d’Aedys Crachevin, agent du quatrième doigt. - 30/02/21

Objet : Surveillance du Chevalier Harek Malthorn, surnommé Froiderage.

Perte de contact avec le Chevalier Malthorn. De source sûre, a rejoint la Croisade Ecarlate en terres tourmentées de Lordaeron. Semble avoir emporté son fils avec lui du témoignage de son ancien mentor. A fuit la justice d’Hurlevent et ne s’est pas expliqué sur l’affaire impliquant sa famille et les Défias.
Suite de la mission de surveillance délicate, demande assistance d’un agent du second doigt.


--Fin du rapport--

Rapport de l’Inquisiteur Tranchefiel de la Croisade Ecarlate. - 15/03/25

Objet : Entrainement de la recrue « fils Froiderage ». Prénom inconnu.

Observations préliminaires : recrue agée de 18 ans. Physique élancé, athlétique. Docile, mais parle peu. Renfermé et taciturne.
Observations après épreuves : La recrue fait montre d’une résistance mentale forte aux brimades et autres vexations. Cependant, tests physiques ont montré certains disfonctionnements. Il ne possède ni la résistance physique, ni la force et l’habileté nécessaire à un maniement des armes optimal. Par ailleurs, malgré une sensibilité avérée à la lumière, il ne l’est pas assez pour envisager de s’engager sur la voie de la prêtrise.

Son père recommande de toute façon qu’il suive la voie du guerrier sacré, malgré les faiblesses évidentes de son rejeton.

Observations après concertation avec les autres officiers instructeurs : la recrue fait montre d’un talent insoupçonné à traiter les blessures les plus grave, comme l’a démontré l’incident d’entrainement de ce matin. Son sang froid en plein combat est total. Il sera affecté à l’arrière, en soutien des troupes. Son entrainement particulier commence prochainement.


--Fin du rapport--

Rapport de l’Inquisiteur Tranchefiel de la Croisade Ecarlate.- 10/04/27

Objet : Désertion de l’aspirant Inquisiteur Froiderage.

Ce matin, l’aspirant Inquisiteur Froiderage, nommé ainsi en hommage à son père récemment décédé à Stratholme, a disparu de ses quartiers.
Une enquête est en cours pour trouver sa localisation actuelle et déterminer ses motivations exactes.

Les premiers témoignages révèlent des informations troublantes sur sa personnalité. Certains de ses anciens camarades suggèrent une vie intime contre nature. D’autres expliquent qu’il n’a jamais supporté son affectation parmi nos soigneurs les plus lourdement armurés.
Il semblerait que son silence n’était qu’une façade pour mieux dissimuler les frustrations qui l’habitaient, ainsi qu’une profonde tendance au pêché qui se révèle désormais par le rapport qui m’a été fait de ses comportements impies.

Il sera fait un exemple de cet homme lorsqu’il sera retrouvé par nos Tourmenteurs.


--Fin du rapport--

[Froiderage]

« Et n’oublie jamais qu’il n’y a qu’une seule règle qui tient et que tu devras la suivre toute ta vie durant. Ne te compromets jamais. C’est le seul moyen que tu as de me rendre fier un jour du misérable bâtard que tu es. »

Ainsi avait parlé Froiderage. Et ses mots résonnaient dans sa tête. Plus encore, lors de cet après-midi ensoleillé, sous les arbres apaisants d’Elwynn.

Il s’était décidé à franchir le pas. A aller de l’avant. C’était peut-être la seule façon qu’il avait d’honorer la mémoire d’un père qui ne l’avait jamais reconnu.

Le nom de l'Ost Pourpre s'était alors imposé à lui comme l'évidence d'un avenir prochain qui servirait une cause que son père s'était fait fort de défendre jusqu'à son dernier souffle... Qui lui permettrait de se faire oublier, un temps, des fanatiques qui ne souhaitaient pas le laisser disparaître ainsi.

« Les fuyards n’auront jamais mon respect. »

Il devait mériter de porter son nom. La seule chose qu'il lui ait jamais offerte. Le seul moyen pour lui d'accéder à sa reconnaissance, même par delà le monde des vivants.

« Tu ne me mérites pas. »

Des mots qu'il avait trop souvent entendu. Des souvenirs de moments atroces, douloureux qu'il ne voulait plus jamais revivre.

Il courba l’échine et serra les dents. De loin, une sentinelle pu voir approcher ce jeune homme étrange, dans son armure usée et crottée, cisaillée par des marques de coups tant nombreux que violents, des assauts répétés qui auraient dû venir mettre un terme à sa vie prématurément.

Il était sur une monture, un destrier facilement identifiable à son harnachement bleu sombre… Et pourtant il n’avait rien du port noble des défenseurs de la lumière. Ses épaules étaient voutées, écrasées par la fatigue; ses traits creusés, ses yeux marqués par des cernes profondes.
Son âge paraissait indéfinissable. Il ne devait pas dépasser la trentaine d’année, c’était certain. Mais cette barbe qu’il portait, ses joues un peu trop fines qui faisaient ressortir des pommettes saillantes, le faisaient paraître plus âgé qu’il ne l’était réellement.

« Ne te compromets pas. »

Il entendait toujours ses injonctions, même à cet instant où quelqu’un s’approcha de lui pour l’accueillir, alors qu’il n’offrait qu’une piteuse image de ce qu’il était.

[Lomah de Sangre]

Je lorgne encore les feuillets entassés sur mon bureau. Je n'en comprends toujours pas le sens. Elenlund me les a fait parvenir avec une missive catastrophée qui ne convint guère à son caractère posé de fonctionnaire.

"Il viendra"

Qui ?

Pourquoi ?

Le charmant correspondant mystère n'a pas jugé bon de nous le préciser, nous laissant à merci d'un petit tas de rapports d'espionnage opaques sur de parfaits inconnus. "Ramassis de conneries" est la première chose qui m'était venue à l'esprit en recevant le message affolée de ma brave Tour Blanche. Mais je me suis ravisée depuis à cause d'un détail... Qui que soit la personne qui nous a fait parvenir ses lettres, elle connait l'Échiquier.
Le terme de Quatrième Doigt ne m'est guère familier, mais j'en déduit, selon tout vraisemblance, qu'il s'agissait là d'un service d'informations interne à la Main d'Argent. L'expéditeur avait du rouler sa bosse dans le milieu, assurément.

Dois-je réellement m'en soucier ?

A vrai dire j'ai d'autre rat plus juteux sur le feu que des prophéties anonymes ou le journal intime d'un espion égaré. Je range donc les parchemins dans mon bureau, à l'abri d'un tiroir. Après tout je ne intéresse guère aux romans, aussi passionnants soient-ils...

- Madame ?

Je n'ai pas noté la présence de Rainer. Sa proéminente moustache maquillerait-elle le bruit de ses pas ?

- Y'a un quelqu'un qui vient postuler. J'lui ai dit qu'on avait mis temporairement un terme aux recrutements, mais .. Il insiste, V'voyez ?

Je soupire. Quelle terrible tâche que la mienne !

-Hé bien, ce sera notre petit secret, faite-le donc monter.

Rainer se glisse vers la porte tandis qu'arrangeant la paperasse encombrant mon bureau je l'interpelle encore :

-... Ah et a-t-il un nom ce bougre de retardataire ?

- Sire Froiderage me lance-t-il du couloir.

Je faillis tomber de ma chaise...

[Froiderage]

Il se tient dans son bureau, désormais. Le dos un peu vouté, écrasé par son armure trop lourde. Il y a sans doute des guerriers qui la porteraient mieux que lui. A y regarder de plus prêt, tout cet harnachement parait plus agé que lui. Peut-être appartenait-elle à quelque d'autre avant d'atterrir sur sa carcasse.

Il n'a pas l'air spécialement mal à l'aise. Mais son regard a la fâcheuse tendance de s'évader pour inspecter les alentours, pour s'attacher aux détails, aux petites choses qui font le décor qui l'entoure.

Certaines personnes irradient d'une aura particulière. Parfois écrasante d'un charisme mal contenu. Parfois juste haïssable dès le premier regard. Et lui... Lui, il n'y a rien, sinon quelque chose de quelconque. Comme s'il était semblable à des milliers d'autres, totalement anonyme, sans traits marquant, sans personnalité ni destinée hors du commun. Comme s'il avait atterrit par erreur dans cette vieille armure qui en des temps meilleurs avait dû être celle d'un grand seigneur.

Mais son regard, quand il croise enfin celui de Lomah, présente quelque chose qui tranche avec cette première impression qu'il donne. Un bref instant, s'installe dans ses yeux bleus sombres l'éclat dérangeant d'une force de détermination que son apparente retenue ne parvient davantage à contenir.

- Bonjour, Dame.

Sa voix est calme, grave. Il lui présente sa main gantée de métal par dessus son bureau pour qu'elle s'en saisisse et lui rende son salut.

- J'espère que je ne vous dérange pas.

[Lomah de Sangre]

La femme qui lui fait face est d'une rousseur indécente, au moins autant que la coupe de sa robe pourpre et noir émaillée de broderie d'or. Jolie, et ce serait le cas même sans ses artifices, mais la belle semble s'ingénier à se façonner une apparence sophistiqué à l'extrême qui lui donne un je ne sais quoi de surnaturel.

- Je vous en prie, asseyez-vous.

Elle lui désigne un siège en face de son bureau -Une pièce rangée, avec de nombreux dossiers et coffrets soigneusement classés, mais avec cette petite touche féminine qui rend les endroits fonctionnels plus agréable qu'il ne les ont en vérité - d'un geste gracieux. Malgré l'évidente aménité de son attitude, il subsiste chez cette femme un détachement, une froideur que seule une longue pratique de l'hypocrisie courtisane a pu développer.

Il n'y a pas de chaleur dans son regard pourtant de feu.
Il n'y a pas d'humanité non plus.
Persiste juste l'illusion.

- Messire Froiderage, je présume. Je suis La baronne Lomah de Sangre des Arcanes de Sangre, Chambellan de l'Ost Pourpre. Il semblerait que vous aspireriez à rejoindre nos rangs...Pour quelles raisons ?

L'entretien vient subtilement de débuter.

[Froiderage]

Le silence. Le genre de silence qui écarte la spontanéité des échanges. Qui laisse supposer l'éloignement de la sincérité.

Il l'observe avec un soin méticuleux. Son regard court sur son visage, glisse sur le moindre de ses plis. Il suit le contour de ses lèvres, bute contre l'arrête de son nez, se noie dans l'incandescence glacée de ses yeux.

Il inspire longuement. Ces quelques secondes lui auront paru durer une éternité.

- Je suis un guerrier sans armée, un noble sans terre, un homme sans Nom.

Il commença, lentement, à retirer ses gantelets cabossés pour dévoiler ses mains pâles, déjà marquées, par les quelques cicatrices, par de la corne. Il les frotta doucement l'une contre l'autre, comme s'il avait froid.

- Mais j'ai beaucoup entendu parler de vous, de la cause que vous défendez.

Il marqua un temps d'arrêt. Son regard dévia lentement vers la chevelure rousse de la Baronne. Elle pu sentir que quelque chose, brièvement, avait interpellé celui qui paraissait si fade. Un détail, peut-être, qui anima ses traits fatigués, leur offrant plus de personnalité qu'ils n'en avaient affiché jusqu'à lors.

Et c'est d'un ton étrange qu'il conclue son argumentaire, ses yeux revenant sur elle, pour la dévisager comme si elle était désormais une autre personne.

- J'ai ma place, parmi vous.

[Lomah de Sangre]

Quel affreux petit rat que voilà !

Mal attifé, dégingandé, mal peigné, mal rasé, mal fagoté dans son armure dépareillée... C'est à se demander si son corps est bien le sien, tant il semble lui aller comme un costume de peau blafarde taillé trop grand.

Mais la Chair ne ment jamais, père me l'a toujours dit.
Et cette viande là est morte ou presque. Elle ne faisande toujours pas parce qu'elle est mue par autre chose, quelque chose qui chatouille mes veines, chante à mon sang, murmure à ma cervelle...

Froiderage, hein ?! Sache que tu me plais.

En dissimulatrice consommée, je laisse échapper un sourire calculé tandis que je pose délicatement mon menton au creux de ma paume.

- Vous êtes un adepte de la sobriété. Après tout, pourquoi pas si cela n'entache pas votre efficacité. Malheureusement, je n'en ai aucune preuve...

Je m'autorise quelques secondes de moue dépitée tout à fait à propos. Puis je penche la tête sur le coté avec un timing parfait.

- Mais vous avez l'air bien sûr de vous... Ça m'intrigue ! Dites-moi donc pourquoi cette certitude ?

[Froiderage]

Un mouvement de recul, tout à fait instinctif. Un visage qui s'éloigne légèrement, jusqu'à ce que sa nuque bute contre la collerette de métal censée la protéger.

Il ne le dit pas, il ne le dira jamais. Mais son regard le trahit. C'est comme s'il avait perçu quelque chose; une menace, apparue brièvement qui lui aurait sauté au visage avec une violence folle.

Elle a le menton au creux de sa paume. Elle fait une moue délicieuse. Sa tête est légèrement penchée.

Son regard cesse de s'agiter. Il la dévisage davantage et s'abandonne aux apparences plaisantes pour se rassurer.

- Parce que je possède déjà une certaine expérience du combat contre le Fléau.

Une certaine expérience. Une expression qu'il lance avec une drôle d'amertume. Un argument qui, seul, ne pesait pas lourd.

- Mes mots ne suffiront pas... Je crois que seule une mise à l'épreuve sera efficace.

Il secoue calmement la tête, son regard la fuyant pour la première fois.

- Je pourrais vous dire, vous montrer, que je sers la lumière, mais je sais déjà que cela ne vous sera pas suffisant.

Ne pas la regarder. Ne pas la regarder.

- Vous attendez autre chose. Et vous êtes sur le point de faire ce qui vous permettra peut-être de l'obtenir. Ici, dans cette pièce. Votre épreuve.

La regarder, de nouveau. Il affiche un air serein, comme quelqu'un qui attend son châtiment comme une délivrance. En l'occurrence son épreuve comme un moyen de s'éloigner d'elle. Vite.

[Lomah de Sangre]

Le temps laisse filer quelques minutes... Jusqu'à la délivrance.

- AHAHAHAHAhahahah ! Aahahahahhahaha ! AHAHAHAHA !!! Aahahahahahahah...

Pour une fois mon hilarité est presque spontanée. Presque.
Je reprends mon calme avec une once de sur-jeu... mais qui n'aime pas cabotiner.

-Hum... Allons, allons mon cher Froiderage, vous me semblez bien tendu !

Je me lève, contourne à pas lents le bureau. Une fois dans son dos je pose mes mains sur ses épaules. Il doit sentir leur chaleur inhabituelle à travers la lourde plaque de son armure. Je me penche pernicieusement, pour le "mettre à l'aise".

- Il ne s'agit là que d'un entretien préliminaire. Vous comprenez-bien que nous ne pouvons recruter de parfait inconnus sur leur simple parole. Faites un effort pour vaincre votre timidité et votre manque d'éloquence... Sinon comment le pourriez-vous face à vos possibles futurs frères d'armes ?

Je tapote affectueusement ses deux grosses épaules féraillées dans un geste encourageant. C'est ce que font les gens gentils, je crois.

-Allons, je vous écoute. Où avez-vous officié avant de venir postuler chez nous ? Dans quel corps d'armée avez-vous combattu le Fléau ?

[Froiderage]

Un regard en coin. Par dessus son épaule. Un visage qui n'a qu'à peine bougé. Elle l'a vexé et elle peut clairement le voir. Il y a quelque chose de déplacé dans cet unique oeil qu'elle peut distinguer. Quelque chose qu'elle avait déjà pu deviner, peut-être même dès leur premier regard échangé. Une fierté boiteuse, meurtrie, sans doute la seule chose qui le tient encore debout. Il la fixe comme si elle avait franchit une limite de trop. Ou lui peut-être. Peut-être s'en veut-il de ses dernières paroles qui l'ont mise dans cette situation délicate.

Mais il ne la chasse pas, malgré tout. Il reste fixe, stoïque, silencieux un moment, alors qu'une fois de plus il la dévisage avec une insistance trop grande pour ne pas être suspecte. Il sent son parfum...

Quelques secondes de tension. Mais elle aura ce qu'elle souhaite. Un nom lâché trop vite.

- Croisade écarlate.

[Lomah de Sangre]

Père m'a dit un jour que j'étais une grande menteuse. Oh, il n'a pas dit ça pour me vexer ou pour me fustiger, non, c'était dans sa bouche une sorte de qualité délicieuse, un met que seuls quelques rares privilégiés ont la possibilité de savourer. Ça aussi c'est inscrit dans la Mémoire de la Chair. Pour certains le mensonge coule à flot dans leur veine plus fluidement que le sang, pour d'autre c'est comme si on lestait leur artères de plomb.

L'honnêteté pèse son poids comme qui dirait !

Froiderage fait assurément parti de la seconde catégorie. Son orgueil blessé se lit dans son regard. Je me recule.

Si il ne peut pas voir son visage à cet instant, c'est pour le préserver d'une vision inquiétante, d'un rictus de requin satisfait, repus, ravi. Pour une fois que je trouve que la vérité paie...

- Vous êtes allé à bonne école...

Je retourne m'asseoir d'un pas léger et je poursuis d'un ton badin.

- Vous êtes Lordaeronien de souche ?

[Froiderage]

Père m'a dit un jour que les femmes étaient toutes les même. Des manipulatrices patentées. Qui utilisaient le verbe parce que leurs bras n'avaient jamais été assez épais pour contrer les poings qu'elles se prenaient dans leurs jolis minois.

Ainsi parlait-il...

Ainsi sa voix revient-elle à son esprit alors qu'il la regarde évoluer dans cet espace, son espace.

Il observe encore une fois les alentours. Ces détails qui rendent la pièce si froide plus féminine. Ses regards. Ses sourires. Cette façon dont elle se met en avant. Son parfum. Ses mots. Sa gentillesse déplacée.

Elle est en train de...

- Je suis né à Hurlevent.

Une réponse trop rapide. A quoi bon mentir.

Il se redresse sur son siège. Les plaques de son armures s'entrechoquent, signe de sangles trop lâches, mal serrées.

Milles questions assaillent son esprit. Sur elle, sur cet endroit. Sur ce qu'elle lui veut. Où elle veut en venir. Il a comme la sensation que ce manège n'est pas une simple manière de recruter. Et pourquoi...

- Pourquoi l'Ost confie-t-il sont recrutement à une femme, Dame ?

La spontanéité de la question tranchait avec sa maitrise d'auparavant. Il était réellement intrigué, certainement ébranlé dans ses convictions et peut-être assez naif pour s'imaginer que sa franchise ne pouvait pas provoquer l'énervement de son interlocutrice...

[Lomah de Sangre]

- Sans doute parce que Le fondateur et chef suprême de notre ordre est une femme. Vous ne le saviez-pas ?

Réponse lapidaire, lancée du tac au tac. Mais avec le sourire, toujours avec le sourire.

- La Connétable Aurys de Nor Laedro a donné vie à cette armée et la dirige de main de maitre. Mais le sexe n'a que peut d'importance dans cette affaire. Seul nos actes comptent. Sachez que si je suis à cette place actuellement c'est que notre dirigeante a jugé que j'avais les qualités nécessaire pour se faire.

Je souris, avec une pointe de fiel, je l'avoue.

- Mais peut-être cela vous déplait-il... que je sois une femme.

Et soudain je change brusquement de position, jambes croisées, tête rabattue sur mon dossier, une main flottant gracieusement en l'air avec une petite rotation du poignet. Une minauderie achevée.

- Et que pouvait-faire un Hurleventien si loin de chez lui, à la Main de Tyr, au creux de la paume des Frères Rouges ?

[Froiderage]

Une femme dirige, une femme recrute. C'est peut-être tout ce qu'il retient de sa longue explication qu'il accueille avec un masque impassible au delà duquel il est bien difficile de deviner quoi que ce soit.

Et le fiel qu'il devine dans son sourire glisse sur lui. Il secoue calmement la tête.

- C'est juste peu commun. Assez peu pour être relevé.

"Ne te compromets jamais."

Il savait ce que son père, lui, aurait fait. Il se serait dressé sur sa chaise. Sa main, violente, se serait déployée vers la gorge blanche de cette crâneuse. Il l'aurait enserré de toutes ses forces, en lui en extraire les yeux de son crâne malingre. Et à son visage, il aurait craché sa salive et toute sa verve. Il lui aurait appris ce qu'était Froiderage. Ce qu'il en coutait de jouer avec lui. Ce qui...

Il esquissa, pour la première fois, un bien étrange sourire, juste après sa dernière question. Comme s'il paraissait satisfait, soulagé d'un poids.

- C'est mon père, Dame, qui emmena l'enfant que j'étais rejoindre les rangs de la Croisade.

Mais pour la première fois de sa vie, peut-être, il allait désobéir à son père. Il n'allait pas se lever et la saisir à la gorge. Il n'allait pas la battre comme lui l'aurait fait. Il n'allait pas lui cracher au visage des immondices qui auraient fait rougir la plus dépravée des catins.

- Mon père. Froiderage. Ancien Croisé de la Main d'Argent. Qui emporta ses convictions en Lordaeron pour défendre le royaume tombé.

De la fierté, peut-être, au fond de ses yeux. Un sourire pour oublier la concession qu'il venait de faire au code strict qu'un père étouffant lui avait imposé. Ses cris n'étaient plus qu'un murmure lointain. Pour le moment.

[Lomah de Sangre]

Je note l'information mentalement. Pour le moment, le roman est fidèle à la réalité. Du moins celle que m'offre Messire Froiderage. Mais comme je l'ai constaté plus tôt, cet homme ne semble pas pouvoir mentir. Il se contente de ne donner que les parcelles de vérité qui l'arrange.

Et pour cela, il se contrôle.

Mon instinct me le crie : "Cet homme est comme toi ! Il est mort une fois." Et depuis lors nous ne faisons que jouer à être encore vivant... Je dois avouer que je m'en tire mieux que lui. Lomah était-elle si blafarde avant de succomber ?

Peu importe.

- Votre père aurait-il perdu ses illusions pour embrasser la Voie Écarlate, celle-là même que réprouve les croisés de la Main d'Argent ? En tout cas je suis surprise de constater qu'un hurleventien ait pu faire carrière dans deux grands ordres de chevalerie typiquement lordaeroniens... Mais peut-être être vous natif d'Hurlevent par votre mère ?


Je guette une réaction quelconque sur ce faciès coulé dans la cire pour cueillir d'autres sensations...

Mon Père a marqué ma chair à jamais pour cette vie.
Son Père en a-t-il fait de même ? Ce sourire fugace, cette fierté tenace ...et pourtant ses épaules es sont imperceptiblement affaissées lorsqu'il s'est mis à l'évoquer.