Au dessus de sa tête, une toile jaunâtre se déformait, des taches de soleil dansaient sur cet écran improvisé accompagnées par le bruit du vent dans les feuilles.
Sa tête était vide, aucune pensée n'arrivait à faire surface. Le spectacle son et lumière qui s'imposait à elle lui emplissait la tête. Plus de notion de temps ni d'espace, plus de souvenir. Rien.
Ce fut l'instinct animal, encré au plus profond de sa nature druidique, qui s'éveilla le premier.Il fallait analyser l'environnement, le danger potentiel de sa situation et surtout: manger.
Le corps immobile étendu sur une paillasse se mit alors en mouvement et c'est une elfe ressemblant plus à une banshee qui écarta péniblement le pan de tissu couvrant la porte. A peine dehors, le pâle soleil des terres de Désolace sembla lui brûler sa peau blanche, sa tête tournait lui provoquant des nausées, l'endroit lui était inconnu...dans un bref instant la jeune femme se transforma en une panthère noire et dans un feulement craintif, la bête rachitique disparue dans les bois alentours.
Son attente pris fin au milieu de la nuit: Avec la discrétion qui la caractérisait, l'elfe de la nuit apparut enfin toujours couverte d'un morceau de tissu en lambeau, ses joues creusées portaient des traces de terre et de sang.
- T'aurais pu manger ce que je t'avais préparé. Grommela l'homme en désignant les morceaux de viande grillés à proximité du foyer.
Elle resta muette, s'assit sur une pierre à côté de lui et dévora le dîner qui lui avait été cuisiné. La chasse n'avait pas du être exceptionelle vu son état. Le draenei sourit.
- Franchement, je ne vois pas pourquoi vous partez dans vos rêves bizarres là, vous avez vu dans l'état dans lequel vous revenez...?
Il guetta du coin de l'oeil la réaction de sa vieille partenaire, espérant désespérement une expression humaine de sa part qui lui garantirait que la lumière était revenue à tous les étages.
Pas de réponse.
- Bon, je vais me coucher. T'éloigne pas, y a des bêtes dans le coin...et d'autres trucs pas sympas.
Il entra dans la maisonette, laissant derrière lui la druidesse affairée à racler les os du repas.
Le soleil était déjà haut dans le ciel du Sud de Kalmidor. Le vent s'était levé pendant la nuit, les arbres faisaient un bruit assourdissant. Le géant se redressa de son lit.
Dans l'encadrement de la porte se dressait Velg. Malgré sa maigreur, sa posture était de nouveau fière, ses ongles et ses cheveux coupés. Elle arborait une tenue décente fabriqué à partir de tissus et d'éléments touvés dans les bois, comme savent les confectionner les elfes de la nuit.
- Allez bouge toi, tu as des choses à me raconter je crois.
Le draenei se leva sans rechigner, dissimulant au mieux le large sourire qui lui fendait le visage. Il sortit et lança avec tout le tact possible:
- ça fait deux ans que tu pionce, tu crois quand même pas me mener à la baguette comme ça la verte!
L'elfe se retourna arborant des yeux écarquillés:
- deux ans?!
- A peu de chose près. J'avais pas compris que ça pouvait être aussi long...
- Comment c'est arrivé?
- On va s'asseoir, c'est vrai qu'on a beaucoup de choses à ce dire.
- Non, marchons, j'ai besoin de retrouver mes muscles!
- Tes quoi?
Les deux amis prirent le chemin de la plaine à l'ouest.
Ça aurait pu être une bonne journée. Elle n'avait plus de souvenir du rêve artificiel dans lequel elle avait été plongée et le temps ne semblait ne pas s'être écoulé pour elle, et pourtant Velg n'avait jamais autant apprécié de sentir le vent, l'herbe, le soleil. En discutant et chassant avec Préltac, elle s'était délectée de ces sensations essentielles.
La mort l'avait approchée de trop près c'était certain, ce n'était pas sa première expérience dans le domaine mais cette fois était différente. Pourtant, après avoir goûté à nouveau aux plaisirs de la vie, elle en redécouvrit rapidement les côtés sombres.
- Je comprends...
De nouveau devant le feu bordé de pierres chaudes, les deux compagnons s'expliquaient.
- Je ne suis pas sur Velg, laisse moi finir.
L'elfe regardait l'espace que son compagnon d'infortune avait aménagé. Une cabane construite de pierres, bois et tissus, ce dernier composant étant utilisé uniquement pour la porte et le toit. Autour de cet abrit s'accumulait divers objets et outils utilisés pour le travail de la terre et pour bricoler des choses et d'autres.
Tout indiquait que l'ancien commandeur avait passé les deux dernières années à vivre ici comme le ferait un paysan local. Même l'allure de l'homme avait changé: finit l'épaisse armure en permanence, pas de hache géante collée à la colonne vertébrale...mais un pantalon de cuir tanné et une chemise jaunie par le temps.
- Non je ne comprends pas, pourquoi n'est tu jamais rentré?!
- Les instructions de la confrérie sont claires dans ce cas de figure et tu les connait aussi bien que moi. Tes congénères m'ont vivement conseillé de ne plus te déplacer, je devais disparaître: cette situation s'est imposée d'elle même.
Le silence se fit.
- Mais la confrérie a du se reformer, ils doivent être à Hurlev...Le draenei la coupa
- Velg, j'ai envoyé les deux messages selon le protocole, je n'ai jamais reçu le signe attendu...
- C'est impossible, la chaîne de transmission aurait du fonctionner, au moins d'un côté...
A peine eut-elle terminé sa phrase que l'elfe se figea et regarda Préltac d'un air ahuri.
- Je me suis dit la même chose, c'est pourquoi nous sommes encore ici à se demander ce que sont devenus les autres.
La jeune femme s'agita nerveusement sur sa pierre.
- Maintenant que je suis réveillée, nous allons pouvoir rentrer, n'est ce pas?
Préltac haussa le ton, irrité, visiblement troublé d'énoncer à haute voix ce qui le rongeait depuis ces deux longues années
- Tu n'as pas entendu ce que j'ai dit?! La chaine n'a pas fonctionnée: les deux voies de communication sont rompues: notre organisation ne fonctionne plus!
- Tu es un imbécile!! fit l'elfe hystérique les larmes aux yeux, il y a du juste avoir un problème avec ton message! Et toi ça te suffit pour rester caché là, comme un misérable, en imaginant que tout est perdu!
- Et ta vieille carcasse! J'en aurais fait quoi la verte?! DEUX ANS à te régénérer!!
Elle se leva et partit dans les bois.
- J'AURAI DU TE LAISSER LA BAS!!
Le draenei se leva, prit une bêche et partit retourner frénétiquement la terre à proximité de sa cabane.
En fin de journée, la pluie fit son apparition. Préltac du placer la planche de bois sur le toit du refuge et couvrir le foyer. Sa camarade revint avant la nuit et les deux équipiers partirent se coucher sans s'adresser la parole.
Affolée ,elle revint en catastrophe au camp, Préltac n'avait pas été plus bavard que la veille au soir ce matin et cet évènement ne lui disait rien qui vaille.
Quand elle arriva à la cabane, elle découvrit son compagnon en train de brûler tous ses biens, les planches et les toiles de la maison, les outils, tout. Les flammes étaient gigantesques, Préltac s'afférait à la tâche d'un air sombre.
Velg savait pertinemment ce que cette action voulait dire, elle posa donc une unique question tout en l'aidant dans sa tâche:
- On va où?
- Hurlevent. Autant aller droit au but.
- Je suis d'accord, excuse moi Préltac, pour...
- Il faudra mettre ces capuchons, on dot être discrets. Il désigna deux capes pendues à une branche d'arbre non loin de là. Juste en dessous, deux sacs déjà remplis attendaient. Il était clair que le géant avait tout préparé depuis longtemps, sa hâte témoignait également de son impatience.
- La fumée aura peut être attiré du monde, on doit bouger maintenant, t'as une paire de bottes dans le sac et des vêtements corrects. dépêche toi!
Le voyage pour la capitale humaine dura trois semaines, ce qui est long, même pour un trajet à pied. Il leur était exclu d'emprunter un convoi de marchands ou la selle d'un voyageur car ces pratiques, en plus de ne pas être discrètes, pouvaient êtres très dangereuses, surtout en Kalimdor. Ils empruntèrent les chemins détournés et furent en peine de trouver un bateau pour traverser l'océan: la guerre entre la Horde et l'Alliance faisait rage. Ils avaient quitté la scène peu avant la chute de Théramore, la tension était déjà à son paroxysme, depuis, les choses ne semblaient pas avoir évoluées dans le bon sens, bien au contraire.
Ils arrivèrent au port de Hurlevent par une journée maussade, en milieu d'après midi.
Notre guilde a tiré sa révérence il y a quelque temps mais nos personnages reprenant du service, il convient de replacer un contexte propre afin de jouer ensemble sans gène quant au passé de nos avatars.
La suite demain!