C'est donc le fessier endolori par des heures de bateau -ou plutôt, d'une espèce de minuscule esquif qui tenait plus de la barque, stable- que le gentilnain fut de retour dans la garnison. Après un court discours de félicitations, et un bref debriefing auprès des troupes en présence, le nain se rendit dans sa chambre personnelle, à l'étage, et entreprit la rédaction d'un rapport détaillé, sous l'ordre du sergent Merath.
Retirant ses frusques détrempées et ses bottines pleines de boues, le nain se posa à son bureau d'érable avant de dégainer une plume de qualité ainsi qu'un papier au grain lourd où il entama la mise au propre du rapport.
Le rapport avait été soigneusement déposé sur le bureau de chacun des officiers."Rapport du Chevalier Martel-de-Givre,
Objet : Dispositifs de l'expédition en Gilnéas,
Écrit et mis sous scellé en la garnison du Ruisseau de l'Ouest,
Le mardi 29 mai.
Je soussigné, Ragthar Martel-de-Givre, chevalier de l'Ost Pourpre et pair du royaume de Lordaeron, atteste et affirme au conseil des officiers de l'Ost Pourpre de la réussite totale de l'expédition entreprise par ma personne en la région de Gilnéas, et assisté sur place par le sergent-instructeur Merath, en charge de la coordination tactique et des manœuvres militaires.
En suite directe avec la piste dégagée après un débat antérieure, et l'autorisation que ledit conseil m'avait attribué de mener une expédition en la région de Gilnéas, accompagné du sergent-instructeur Merath, de l'écuyer de Malarme, de l'écuyer von Lutgardis ainsi que du page de Mortebrume, nous nous rendîmes au jour du 28 de ce mois dans la région susnommée.
C'est avec enthousiasme que je vous fait mention de la réussite de l'expédition, celle-ci menée à bien n'aura connu aucun mort non plus que de blessé. L'expédition est rentrée saine et sauve.
En l'après-midi du 28 de ce mois, l'expédition précédemment nommée, présidée par ma personne, se rendit au port de la ville de Hurlevent, où notre moyen de transport maritime nous attendait.
C'est après plusieurs heures d'une traversée aussi longue que dénuée d’intérêt que nous arrivâmes en la région de Gilnéas, aux pieds des falaises de la côte Est, jouxtant directement le fief du seigneur Waldem.
Fief qui, notons-le, était le premier lieu de l'expédition.
C'est donc fort des consignes exposées à notre arrivée sur le littoral que nous empressions de monter les canassons que ser von Lutgardis avait pris soin de nous faire parvenir par le biais de ses contacts.
Je m'empresse alors de faire mention de l'inquiétude immédiate qui frappa l'écuyer von Lutgardis : en plus des montures aurait du nous attendre un guide qui nous aurait accompagné. Il n'en fut rien, seuls les chevaux étaient présents.
Décidant de faire fi pour le moment de cet élément, je mandais le départ immédiat des troupes.
C'est alors que nous remontions la falaise que nous découvrîmes un charnier jonchant la route en surplomb, juste devant la herse d'une propriété que l'écuyer von Lutgardis reconnu comme étant celle du seigneur Waldem.
Sur les ordres du seigneur Merath, nous vînmes nous enquérir de sa nature avec discrétion et méfiance, et c'est ainsi que nous entendîmes d'étranges bruits étouffés surgir des cadavres.
Quelle stupeur ne fut pas notre quand nous ressortîmes une gnome, se présentant comme une certaine Bergamotte Frontdepins, appartenant visiblement à un groupe humanitaire dénommé "la croix de bière".
Nous la questionnâmes quelques peu, et elle aussi, et nous parvînmes à un comme-un-accord : blessées, nous la laissions nous accompagner si tant est qu'elle ne nous dérange pas dans nos travaux.
Reprenant route vers la deuxième constante du fief, un phare au milieu des eaux, relié aux falaises par un grand pont délabré, nous nous arrêtâmes en route sous l'interpellation de l'écuyer de Malarme, qui avait vu un cavalier quitter le pont et partie au galop à l'intérieur des terres.
Suspicieux, nous nous rendîmes sur le pont en avançant à tâtons.
C'est alors que nous évitâmes le pire. Je ne saurais dire si cela vient de ma petite taille, toujours est-il que j’aperçus quelques traces de poudres diluées entre les pavés du pont. Si celles-ci, détrempées, ne présentaient aucun danger, cela n'était pas le cas du feu que nous avions pris comme celui du phare et qui en fait était un incendie.
Hurlant le repli, le sergent Merath mis tout le monde à l'abri. Et à raison : quelques secondes plus tard, une explosion vint balayer les fondations de la bâtisse, l'entrainant par le fond en le faisant s'effondrer sur lui-même.
Le sort du pont ne fut pas plus glorieux : vétuste, il ne supporta pas les chaos du souffle de l'explosion, et parti rejoindre le phare dans les profondeurs.
Nous nous ruâmes sur nos montures et nous quittâmes ce lieu le plus vite que ces dernières nous le permirent.
L'on notera donc la coïncidence entre le départ du cavalier en hâte, et l'explosion du phare qui s'ensuivit.
Ce n'est qu'après plusieurs minutes de galop intense que nous arrivâmes sur les terres du seigneur Ashbury, deuxième fief que nous avions pour projet d'explorer.
Celui-ci se composait en outre d'une immense mine ainsi que d'un village prolétaire, comme me l'a renseigné l'écuyer von Lutgardis.
Jugeant qu'il serait trop dangereux de nous aventurer dans les souterrains, nous portâmes notre attention sur le village non loin.
Rien de bien intéressant en ce lieu, l'on notera en outre :
-Trois bâtisses relativement délabrées,
-Un nombre impressionnant de vieux tracts des industries Steelwood, laissant supposer un potentiel partenariat entre Ashbury et Steelwood,
-La fuite d'un autre -ou du même- cavalier de la dernière bâtisse, ne nous laissant pas le temps de l'entrapercevoir. Cette fois, aucune explosion.
Notons également que la gnome nous accompagnant n'a eu de cesse de nous questionner sur nos relations avec les industries Steelwood.
Je décidai alors de mener l'expédition en son dernier lieu : le fief du seigneur Godefroy, réputé pour haïr les worgens, et dont je doutais fort de la culpabilité.
Nous n'avions d'autre choix que de passer par la capital désertée, et c'est à contrecœur que je menai mes confrères, et ma consœur, par delà les canaux de la ville. En quittant ces-mêmes canaux, nous fûmes repérés par un réprouvé, et nous nous ruâmes en dehors de la ville et à travers les campagnes.
Cet interlude ne donnera lieu à aucune suite.
Nous arrivâmes sur les rives d'un fleuve longeant la ville de Quilleport, nous faisant face de l'autre côté du courrant d'eau.
Une barque nous attendait sur la rive, et nous l'empruntâmes pour rejoindre la ville.
Dès l'accostage, notre compagnonne gnome nous quitta pour foncer vers un inconnu, tout de blanc vétu et non-chaussé, occupé à cuisiner un curieux potage.
Nous nous approchâmes non sans méfiance, et l'homme se révéla finalement être un docteur, survivant de la guerre de Gilnéas. Nous apprendrons par la suite qu'il avait survécu en se réfugiant dans les montagnes, avant de se rendre en Quilleport.
En outre, nous apprîmes que Bergamotte Frontdepins était son infirmière, l'homme étant aveugle.
Tous deux nous conduirent à leur maison, excentrée de la ville, dans laquelle nous nous résignâmes à nous rendre, après quelques examens de sécurité préalables.
En outre, nous parvînmes à faire parler nos hôtes, c'est ainsi que nous découvrîmes que :
-Malgré les affres de la guerre, désormais finie, le pays est scindé en de nombreux groupuscules se disputant la souveraineté des terres.
-Le plus important : un groupe de nationnalistes et patriotes gilnéens, anciennement présidé par le docteur, avait pour mission de traquer et d'éliminer les "traitres gilnéens" (les collaborateurs, espions, déserteurs et compromis).
-Ce-même groupe se dénomerait "La Faucille" et se serait en outre charger de plusieurs de ces "traitres gilnéens".
-Avec la fin de l'invasion réprouvée, le docteur "Willem" (le susnommé) en avait annoncé la dissolution, et la plupart de ses membres le quittèrent.
-Certains de ses membres continuèrent leur tâche, et selon leur ancien dirigeant, il est fort probable que le groupe ait désormais une portée plus large que nationale.
-Il serait fort probable, selon le docteur, que ce-même groupuscule ait élu domicile dans les souterrains du bourg de Karazhan, ceux-ci ayant été envisagés par la passé par le groupe comme quartiers-généraux.
Notons également que le lieu fut surnommé "le domaine du veilleur" en l'hommage au gardien Medivh.
Le retour se fit sans mal, jusqu'à notre esquif qui nous ramena quelques heures plus tard à bon port sans autre formes de malice.
Enfin, je tiens à préciser que le docteur en question n'a accepté de nous fournir les informations concernant ledit groupe "la Faucille" qu'en l'échange de notre parole : nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir afin que les membres du groupe ne se fassent pas tuer, ni traqués par les industries Steelwood.
Au risque, sinon, que certaines rumeurs désobligeantes soient colportées à notre encontre.
Je me tiens à la disposition du Conseil des officiers de l'Ost Pourpre, ainsi qu'à chacune de ses composantes prise individuellement, pour de plus amples détails sur l'expédition.
Chevalier Ragthar Martel-de-Givre.